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 récidive, conditionnelle et dérives politiques

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Herzog-Evans
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Herzog-Evans


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MessageSujet: récidive, conditionnelle et dérives politiques   récidive, conditionnelle et dérives politiques EmptyDim 26 Juin - 10:54

Arrow Un rapide rappel pour nos amis étrangers, de ce qui se passe en France depuis quelques semaines :
- après les résultats du référendum, un remaniement ministériel a eu lieu qui a amené au gouvernement, à l'intérieur, M. Sarkozy, au discours notoirement et habituellement populiste, car il a des visées évidentes sur les prochaines élections présidentielles, et à la justice, M. Clément, qui était quelques mois plus tôt en tant que député, auteur d'une proposition de loi sur la prévention de la récidive au contenu totalement aberrant et ultra répressif, que, fort heureusement le Sénat, notr seconde chambre fruit d'un suffrage indirect, avait ramené à de plus justes proportions... l'assemblée nationale (directement élue par la population), elle, étant depuis longtemps, hélas, une chambre d'enregistrement
- comme si cette configuration ne suffisait pas, un condamné en conditionnelle, libéré après seulement 15 ans de détention sur une peine perpétuelle, commettait un crime odieux, en récidive donc.

Depuis c'est l'acharnement médiatique sur les libérations conditionnelles, spécialement pour les longues peines, l'acharnement politique et les délires verbaux oportunistes des politiques et spécialement de M. Sarkozy.

La proposition de loi déposée antérieurement par M. Clément sera certainement adoptée sans plus de discussion.
Il est en outre question de développer l'échevinage en l'étendant au Tap , juridiction statuant sur les longues peines pour les LC et suspensions mécales de peine, alors qu'il ne concernait jusque là que la Cour d'appel statuant sur les décisions du Tap.

study Quelques observations et quelques réflexions

Arrow En premier lieu, il est exceptionnellement rare qu'un condamné à une perpétuité obtienne effectivement une libération conditionnelle au bout de seulement 15 ans. Même si le CPP le permet, l'on voit de pl:us en plus de "perpètes" avoir du mal à obtenir des LC, avant au moins 20/25/30 ans et plus. D'une part parce que les périodes de sûreté qui se sont développées depuis 1978 l'interdisent ; d'autre part parce que les juridictions ont très peur. L'affaire en cause en ce moment est donc aussi exceptionnelle à ce titre. Le dossier de l'intéressé devait en conséquence être excellent. De la difficulté de juger...
Et c'est l'occasion de dire que les magistrats ne sont pas des criminologues, que cette profession, sur le plan clinique, n'existe pas en France, en sorte que l'on se prononce, outre les critères légaux, au mieux sur un aspect du pb, l'aspect psychiatrique (expertises), mais pas sur l'ensemble des facteurs qui peuvent conduire à la récidive.
S'il était une réforme utile, ce serait donc celle, de fond, qui conduirait à la reconnaissance de cette profession, à l'instauration de cursus authentiques de criminologie..... Mais cela suppose des efforts, de l'argent, des créations de postes....Il est tellement plus facile de discourir de manière verbalement agressive sans aucune réflexion de fond ni intention réelle d'avancer sérieusement sur le dossier ni encore moins d'investir financièrement. Il est vrai que le travail de fond prend du temps et que le temps, le gouvernement ne l'a pas en sorte qu'il préfère come d'autres avant lui, des effets d'annonce sans lien avec les questions posées que les traiter véritablement.

Arrow L'autre aspect du problème que pose la récidive litigieuse est la réalité du contrôle à la sortie. Il est vrai que sur ce point, la proposition de loi Clément semble a première vue y répondre en prévoyant de mettre un bracelet électronique à certains sortants de prison. Cependant la faisabilité technique de ce dispositif est sujette à question. Par ailleurs le bracelet ne saurait constituer une panacée : il permet de contrôler une partie des actes d'une personne, mais pas tous. En outre il ne permet per se absolument pas de réaliser un travail de quelque nature que ce soit sur celle-ci, de nature à lutter contre ses démons et par conséquent à d'ultérieures récidives, ou à d'autres formes de récidive.
Le contrôle doit être non seulement réel ; il doit aussi être réformateur. Et c'est là toucher du doigt le véritable problème qui se pose aujourd'hui : nous manquons de Jap et de travailleurs sociaux, dans des proportions inouïes ; nous manquons tout autant de psychiatres et de psychiatres compétents pour traiter spécifiquement des formes de récidive les plus graves (homicides, agressions sexuelles...). S'attaquer à la récidive suppose là aussi de créer un nombre de postes conséquent, une réflexion approfondie et fondée sur les données de la science et de la pratique criminologiques (par ex. en s'inspirant de ce qui se fait au Canada). Cela suppose du temps, de l'argent, une réelle volonté politique de traiter la question. A des années lumières d'opérations de "nettoyage" sous les feux de la rampe...

Arrow Le débat actuel soulève enfin la question de la participation des victimes au procès d'application de la peine. Ce problème ce scinde en deux : est-ce opportun ? De quelle manière est-ce possible ?
Question L'opportunité de la participation des victimes au procès d'application des peines est une question nouvelle. Elle est soulevée, d'une part, en raison des pressions des associations de victimes, lesquelles traduisent une évolution de la société et du droit en général (le droit pénal a longtemps écarté la victime ; il lui fait une place grandissante depuis quelques années), d'autre part, en raison de modèles extérieurs (canadien) et d'obligations conventionnelles (l'Europe nous l'impose). Cependant il est souvent avancé que la victime ayant eu son procès lors du jugement répressif, il serait inutile et dommageable de la faire revenir à une audience ultérieure, et parfois très éloignée dans le temps. Ce serait rendre son deuil impossible par la réactivation de sa douleur. Ce serait lui donner une voix dans un sujet ne la concernant plus (: son problème étant l'indemnisation, la reconnaissance de sa qualité de victime et, le cas échéant, le principe de le quantum de la condamnation). Ce serait aussi influencer les juges dans un sens systématiquement contraire à la préparation de la sortie, laquelle serait non seulement préjudiciable au condamné, mais aussi à la société toute entière : l'exécution de la peine doit non seulement constituer une affliction vengeresse, mais aussi permettre de tourner celui qui en fait l'objet vers la reconstruction et la resocialisation. Cependant ces arguments ne sont pas tous convaincants. Notamment, les victimes estiment avoir un intérêt à ce qui se passe après la condamnation. Il leur serait particulièrement pénible d'apprendre qu'une personne a récidivé ; il leur serait nécessaire de savoir à quelles contraintes elle a été astreinte. En outre, l'influence des victimes sur le juge est à relativiser : le magistrat est un professionnel de la décision en présence d'arguments qui s'opposent et se contredisent. Il entend le point de vue de plusieurs parties et tranche. Tout dépend toutefois de la manière dont les victimes doivent être entendues.

Question Les modalités de la participation des victimes au procès d'application de la peine sont également sujettes à débat.
Il n'est pas aberrant que la victime soit informée de ce qui va se passer après la condamnation. C'est au demeurant ce que la loi Perben 2 (L. du 9 mars 2004) a prévu et que son décret d'application (D. du 13 dec. 2004) a étendu. Il est à noter que ces textes prévoient que la victime peut ne pas vouloir être informée. Le deuil passe, pour certaines victimes, par l'oubli.
Il est possible, à mon sens, qu'elle fasse entendre sa voix dans le procès lui-même, soit directement, soit par l'intermédiaire de son avocat, que ce soit en déposant, ou par écrit. Des observations écrites peuvent dans le droit actuel être adressées dans la phase préparatoire du procès d'application des peines, mais pas au cours de l'audience. La présence de la victime reste écartée ; elle ne peut pas plus être représentée par un avocat. Certes ceci conduirait au rappel des faits et à la souffrance de la victime. Cependant tel est déjà le cas dans la plupart des affaires, notamment criminelles : les juridictions motivent déjà en les rappelant, parfois avec force détails. Encore une fois, le juge tranche en présence de l'ensemble des éléments. Il n'est pas aberrant qu'il puisse disposer de leur totalité. Mais la participation de la victime devrait rester, pour elle, facultative.
En revanche étendre la participation des victimes à la PRISE DE LA DECISION, en étendant la participation des associations de victimes (et corrélativement, d'ailleurs, des associations de réinsertion) aux juridictions de premier degré que sont les Tap, n'est pas une solution adaptée. Certes cette participation concerne déjà, je l'ai dit, la chambre de l'application des peines de la Cour d'appel. Cependant, elle ne concerne que certaines décisions (appels des libérations conditionnelles, suspensions médicales de peine et relèvement des périodes de sûreté prononcés par le Tap) que les longues peines (peines prononcées supérieures à dix ans ou reliquats de plus de trois ans) et est purement le fruit de l'histoire (elle est la réplique de l'ancienne participation de ces associations à la commission qui préparait les dossiers des libérations conditionnelles des longues peines lorsque la décision appartenait au garde des sceaux, soit avant 2001). Elle se fonde aussi sur la volonté d'accroître la collégialité pour des décisions supposées plus lourdes de conséquence, sans pour autant faire participer un nombre supérieur de magistrats professionnels, ce qui serait plus coûteux et matériellement difficile, dans le contexte de pénurie actuel.
Où l'on en revient aux problèmes de coût....
Les victimes veulent faire entendre leur voix, cela est légitime. Il n'est pas admissible en revanche de les faire participer directement à la décision au fond. A suivre pareille pente, l'on verrait bientôt des associations de victime participer au jugement répressif ! Ce qui se cache derrière cette proposition, mais n'ose pas se dire clairement, est la volonté d'orienter systématiquement la prise des décisions dans le sens d'un refus des aménagements de peine. Il serait alors plus clair de dire que l'application de la peine n'a d'autre objet que de faire en sorte que les condamnés purgent la totalité de peines qui, par ailleurs, quoi qu'en disent les politiques adeptes du discours populiste, n'ont cessé de s'allonger à a fois dans leur prononcé et dans leur exécution effective.
Mais ce n'est nullement ainsi que l'on protègera la société contre la récidive. Le faire efficacement suppose d'élargir des personnes prêtes à l'être, au moment où elles le sont, ni plus tôt ni plus tard, avec un authentique suivi social, voire éducatif et psychologique ou psychiatrique et un cadre matériel minimal (logement, travail ou formation...). Il faut pour cela pouvoir détecter, juger, suivre, contrôler et aider.

Ce que l'on nous vend actuellement (restrictions aux aménagements... décisions prises en partie par des représentants de victimes...) n'est que du vent. Il aidera sans doute à faire élire des politiques incompétents ; il ne permettra nullement de prévenir réellement la récidive. Nous ne serons pas plus en sécurité ; nous serons moins en sécurité.
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